Chrétien, connais-toi toi-même !

Septembre 2008

Là où certains chrétiens voient un problème d’ordre spirituel, ils feraient bien de regarder au fond d’eux-mêmes, dans leurs émotions profondes, ces choses très terre-à-terre. Certains qualifient cela d’introspection maladive, de nombrilisme ou de retour dans le passé. Pas du tout ! Il s’agit d’accueillir Jésus dans nos profondeurs, car il veut les évangéliser. C’est là que nous pouvons nous reconnecter avec notre vraie personnalité...

Notre civilisation occidentale est fortement marquée par la raison (« Je pense, donc je suis » a dit Descartes) et la science (qui prétendait tout expliquer et maîtriser). Sans faire le procès de l’intelligence humaine, qui est une donnée de la création divine, force est de constater que notre siècle a atteint certaines limites de ce pouvoir. Au siècle dernier déjà, les hommes ont de plus en plus touché à l’impuissance et à l’angoisse face à ce qui les dépassait.

Certes, l’homme peut accomplir de grandes choses, briller en ingéniosité et en audace… mais cela peut être détruit en quelques minutes… L’homme est fragile et son pouvoir aussi. Si notre société a tout raisonné et analysé, beaucoup d’hommes et de femmes n’en étaient pas satisfaits, à juste titre. Ils ont trouvé d’autres réponses dans la foi, dans une réconciliation avec Dieu par Jésus-Christ.

Mais un autre danger les guette, me semble-t-il. Une certaine approche de la vie chrétienne tend à tout spiritualiser, à tout expliquer en termes de foi, de combat spirituel même. Cela peut malheureusement conduire ces chrétiens (ou ces responsables) à « réduire » la réalité humaine – comme la raison le faisait déjà avec ses systèmes rationnels – à cette part invisible de son être, l’esprit.

Qu’est-ce que l’homme ? se demandaient les auteurs bibliques. Certes, l’Evangile éclaire notre vie d’une lumière nouvelle. Nous ne sommes pas que « matière » (ou corps et jouissance immédiate). Nous ne sommes pas qu’« esprit » (dans un autre monde). Chacun sait que nous avons une volonté, une intelligence et des sentiments, des émotions. Nous avons une conscience morale, nous avons besoin que notre vie ait un sens dès ici-bas.

Mais comment cela fonctionne-t-il ? Notre civilisation a perdu ses repères spirituels, notre foi a perdu ses repères humains. Que voyons-nous dans nos consultations ? Le plus souvent, nous constatons deux phénomènes : le refoulement des émotions désagréables (très fréquent), ou un débordement émotionnel (plus rare). Cela conduit à beaucoup de difficultés et de confusion. Vu de l’extérieur, tout semble aller bien, mais à l’intérieur, chacun cache une partie de soi peu glorieuse. Où est la vraie personne ? Nous entendons une affirmation fréquente : « Je ne sais pas qui je suis… », ou encore « Je ne sais pas ce que j’aime, dans quelle direction aller… » Nous comprenons mieux pourquoi certains aimeraient que Dieu leur révèle sa volonté. Car elle est, d’après eux, forcément opposée à la leur, et la bonne réponse ne peut être que spirituelle…

Si des mouvements de toutes sortes foisonnent pour mieux se connaître et se développer, c’est bien qu’il y a un problème : les chrétiens ont perdu le contact ! Mais pourquoi ce titre : « Chrétien, connais-toi toi-même » ? Un pasteur l’a très lucidement dit : « On ne peut pas être un chrétien spirituellement mature tout en restant émotionnellement immature ». Phrase-choc, mais tout est là. Là où certains chrétiens voient un problème d’ordre spirituel, ils feraient bien de regarder au fond d’eux-mêmes, dans leurs blessures, leurs émotions, leurs réactions inconscientes, ces choses très terre-à-terre… Certains qualifient cela d’introspection maladive ou de retour dans le passé. Non, il s’agit d’accueillir Jésus dans nos profondeurs, car il veut les évangéliser ! C’est libérateur.

Comment se connaître ? Le paradoxe est que nous avons d’abord à nous reconnecter avec la réalité difficile – voire- inacceptable – de notre vie. La réalité est la réalité. Notre réaction à cette réalité a été notre choix, même inconscient. Elle indiquait déjà quelque chose de notre personnalité. Aujourd’hui, nous pouvons faire un autre choix par la grâce de Dieu. Il y a ce que nous avons subi dans le passé, mais aussi ce que nous aimons et voulons dans le présent. Dieu n’est pas contre nous. Nous ne sommes pas que mauvais. Progressivement, nous nous reconnectons avec nos sentiments, notre intelligence, notre volonté. Un nouveau chemin, celui de la vie que Dieu veut encore pour nous, se dévoile à nos yeux. Nous nous retrouvons nous-mêmes, en apprenant à nous re-connaître tel que nous sommes… et pouvons devenir !

Bernard Bally

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