Sommes-nous tous des abusés ?

Il y a abus dans chaque dépassement ou manque de limite. Le dépassement est le fait des abuseurs, et le manque est celui des victimes. Il peut y avoir abus par maltraitance ou négligence, par inconscience, par égoïsme, par manipulation ou par perversion. Il n’y a jamais abus lorsqu’il y a respect de la personne.

C’est le titre d’un livre qui vient de sortir en librairie, écrit par la doctoresse Cornelia Gauthier, généraliste et psycho-somaticienne. Après des générations de non-dits et de secrets bien gardés, sommes-nous entrés dans le temps où l’on voit l’abus partout ? Je ne le crois pas.

Bien sûr, on ne peut éviter que certains tombent dans des excès. Dénoncer un problème dont tout le monde parle peut faire office de « compétence », surtout quand on y rajoute un peu facilement la « compétence » dite spirituelle. Attention aux risques de dérapages et de souffrances inutiles !

Si l’on réfléchit bien, le premier abus dont tous nous avons été victimes est celui du trompeur et abuseur par excellence, Satan. Depuis Adam et Eve, nous sommes « dissociés » par le mensonge, « décalés » psychologiquement, « coupés » spirituellement, de notre vraie nature selon Dieu. Les transmissions générationnelles ont fait le reste : meurtre, vol, jalousie, rivalité, convoitise, etc. A la base, il y a pour chacun de nous la tentation de puissance dont parle si bien Simone Pacot. Abuser, sous une forme (douce) ou une autre (dure), fait partie de notre héritage. Le livre cité propose un inventaire des diverse formes d’abus, sexuels, physiques, émotionnels, et décrit certains symptômes psycho-somatiques qui en sont les révélateurs.

Mais parlons des abusés. Il y a abus dans chaque dépassement ou manque de limite. Le dépassement est le fait des abuseurs, et le manque est celui des victimes. Il peut y avoir abus par maltraitance ou négligence, par inconscience, par égoïsme, par manipulation ou par perversion. Il n’y a jamais abus lorsqu’il y a respect de la personne.

La personne abusée est une victime. L’abus a créé un désordre émotionnel. La guérison ne peut pas se produire par le raisonnement, par la volonté ou le pardon seuls. L’abus signifie toujours : « tu n’existes pas, j’ai un droit sur toi, tu es à mon service ». Le processus thérapeutique consiste en une lente reconquête du terrain non respecté. C’est un travail émotionnel et cognitif qui prend du temps. C’est celui qui permet à la personne de se retrouver elle-même, libérée des faux pouvoirs qui ont envahi sa vie. Il ne s’agit pas d’un acte magique, même enrobé de spiritualité chrétienne, mais de redonner à la personne la capacité de gérer sa vie et ses émotions de façon responsable et libre.

Bernard Bally

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